Poireaux, en vert et contre tout

48h dans la peau d’un Team Manager (bis)

Après un premier essai en tant que Team Manager à Varennes, le Creusot était pour moi une seconde occasion de faire mes armes en tant que TM de la Poirsouille Endurance Team. Un défi que je redoutais presque autant que je l’attendais avec impatience. Il faut dire que ce n’était que la troisième course à laquelle je participais et la première où j’allais officier comme Team Manager, capitaine du navire. Autant dire que c’est quasiment comme sauter dans le grand bain sans forcément savoir nager !

Mais sans vouloir faire ma lèche-bottes, il faut reconnaître que nos Poireaux roulants savent mettre à l’aise. Déjà ils se connaissent et connaissent leur façon de rouler. Mine de rien, c’est énorme et surtout très pratique. J’étais donc sûre de pouvoir compter sur leurs conseils même si la décision finale me revenait. L’autre point fort aussi, c’est que dans l’équipe étendue, tout le monde s’entend. Comme je l’avais dit lors de mon tout premier compte-rendu pour la Team, on forme une famille de légumes de tous calibres !

Tout a commencé pour moi un peu avant la course, en effet, il y a eu une petite session de briefing le mardi précédant la course. L’objectif de cette petite réunion téléphonique était de faire un tour d’horizon du déroulé de la course, mais aussi de discuter des différentes stratégies possibles le jour J. Xavier et Seb avaient tellement bien préparé ça que j’ai à peine eu à formuler des questions. Ça m’a aussi permis d’arriver sur place avec l’esprit dégagé.

La Course : quand faut y aller, ben, faut y aller !

Je suis donc arrivée avec Marie, la troisième pilote pour ce week-end, après la fin des essais libres du vendredi. Directement pour le repas du soir et l’installation dans le camping hollandais qui nous a offert un séjour inoubliable… Et très vite, à peine le temps de commencer le repas, je me suis attelée à mon rôle de Team Manager : un petit débrief avec Xavier et Seb pour avoir leur ressenti sur le circuit, puis parler stratégie pour les essais du lendemain – essais libres le matin, puis deux sessions de qualifications l’après-midi, et aussi des aspects pratiques par exemple quelles données afficher au panneautage ou quel geste utiliser pour dire « je veux sortir », comment panneauter le ravitaillement puisqu’on n’a pas de panneau « fuel ».

Pour les essais matinaux, le choix s’est porté sur du 15/7.5/7.5 en termes de partage de temps et Marie, Xavier, Seb pour l’ordre des pilotes. Le but était de permettre à Marie de se familiariser de nouveau avec la moto. Les trois pilotes roulent dans des chronos assez réguliers et c’est plutôt top. Côté panneautage aussi ça assure, je n’ai qu’à me concentrer sur mon chrono. Le gros avantage pour un Padawan Team Manager sur ce circuit c’est que depuis notre position sur les paddocks, on peut voir la quasi-intégralité du circuit, ce qui aide beaucoup à repérer notre pilote sur la piste.

Pour les qualifications, on décide de conserver l’ordre établi, avec un peu plus de temps pour Xavier pour qu’il essaye de claquer un chrono, car c’est pour le moment le plus à l’aise sur le circuit. Cette fois donc, ce sera donc du 5/15/10. Marie prend le départ dans la meute et se fait la main pendant quelques tours avant le relais. Comme à son habitude, Xavier joue les horlogers suisses et roule régulièrement. S’il n’arrive pas à décrocher le fameux 46 du défi de Brice, il arrive à descendre à 47.9. Quand vient le tour de Seb, il semble avoir eu le déclic et tente de piquer la réputation d’horloger de Xavier, se payant même le luxe de faire un 48.2 (auquel il n’a pas cru) après avoir régulièrement été entre 48.5 et 49.5.

Pour la deuxième qualification, Xavier ayant émis le souhait de faire l’essai de départ, on inverse l’ordre pour obtenir Marie, Seb et Xavier, chacun conservant le même temps sur la piste. Malheureusement, cette qualification est plus dense que la précédente et il n’y aura pas d’amélioration des chronos, bien que la régularité soit toujours là. À la fin des qualifications, nous sommes 23es, soit en 8e ligne.

Vient alors le moment tant attendu et redouté : le jour de course (imaginez une musique dramatique en lisant cette ligne). Les derniers réglages avant le warm-up se font dans les paddocks. Puis, entre la fin du warm-up et le début de la course, c’est « quartier libre ». Je fais mes derniers choix sur la stratégie à adopter : l’ordre de départ déterminé par les essais à savoir Xavier, Seb et Marie, la prévision du relais ravitaillement aux alentours de la deuxième heure de course. Il n’y a ensuite plus qu’à attendre le départ. Je sens un peu la pression monter, probablement moindre que celle des pilotes, mais quand même. Nous sommes tous à nos postes et concentrés lorsque le départ est donné.

Malheureusement, après une poignée de tours seulement, la concurrente directe de Xavier chute. Je ne le vois pas immédiatement et dès que le drapeau rouge commence à s’agiter, je le cherche du regard frénétiquement. La course est interrompue le temps d’évacuer la pilote, pendant ce temps-là on rejoint Xavier, marqué par la chute, qu’on essaye de réconforter de notre mieux. La course reprendra au bout d’une vingtaine de minutes, mais sa fin ne sera pas décalée : il reste donc 3 h 30 de course et Xavier reprend le départ. Je lui répète plusieurs fois que s’il ne se sent pas bien, il peut nous demander à sortir sans aucun problème. Il repart et reste dans ses chronos, mais Romain remarque qu’il a l’air tendu au bout de quelques tours. Voulant lui dire de se calmer (au sens, se détendre), je décide alors de lui mettre un « Slow ». Incompréhension de sa part lorsqu’il voit l’indication. Puis visiblement, il finit par entendre le message. Au bout de quelques tours supplémentaires, je lui mets un petit « Gaz ».

Puis vient le tour de s’élancer pour Seb. Ses chronos sont quasiment les mêmes que ceux de Xavier et son relais se passe sans encombre. Pendant ce temps, on arrive à remonter de la 23e place à la 21e, voire la 20e. Marie s’élance à son tour et parvient à améliorer un peu ses chronos malgré le fait qu’elle soit un peu coincée dans la masse. Les relais s’enchainent sans accrocs et nous restons un peu coincés à la même place.

Le plus gros pari de cette course se fit sur le ravitaillement en essence. Comme la course avait été amputée de 30 minutes, et après les calculs conso, on a décidé (avec pas mal d’hésitation de mon côté) de ne pas ravitailler avant la fin de la course. À une heure de la fin, Brice vérifie quand même le niveau d’essence lors d’un relais. Pareil avant le dernier relais, qui laissait donc le guidon et la fin de course à Seb. Cependant au bout de deux tours, Seb nous fait signe qu’il veut rentrer. Malheur, aurions-nous mal évalué le reste d’essence ? Je mets en branle le ravitaillement qui malgré son aspect inattendu se déroule bien, malgré une petite latence. Seb ne sachant pas trop s’il pouvait remonter, laisse le guidon à Marie qui s’était préparée entre temps. Ce cafouillage nous fait perdre une place. Marie se donne à fond, mais d’un point de vue du chrono, il y a un souci. À cinq minutes de la fin, elle nous fait signe qu’elle veut sortir, au moment où j’allais balancer qu’il restait 5 minutes. Xavier bondit dans son casque puis sur la moto et franchit péniblement le drapeau à damier. À cet instant-là, je dois avouer qu’on ne comprend pas trop ses derniers chronos. Il n’empêche qu’on saute quand même de joie quand il passe le drapeau à damier juste avant de  le rejoindre au parc fermé.

Nous finirons à la 19e place suite aux déclassements, soit 12e de notre catégorie, pas très loin d’un Top10.

Je suis venue, j’ai vu, j’ai apprendu !

Et j’ai vaincu, un tout petit peu. Mais on a que dix-neuf chaises.

Si la course s’est bien déroulée dans l’ensemble, tout n’a pas non plus été parfait. Déjà, parce que j’ai quand même « lamentablement » oublié d’envoyer la confirmation à Xavier de l’état de la pilote n° 6 dont la chute avait marqué le début de la course. Mais aussi parce que j’ai commis quelques petites erreurs, entre un cafouillage sur le chrono [j’y ai presque cru à mon 46.9 – Note de Xavier] et quelques incompréhensions de communications ou encore mes hésitations par rapport au ravitaillement, je dois avouer que je ne suis pas forcément très contente de moi. Mais ce n’est pas non plus évident de penser à tout dans le feu de l’action (ceci est une excuse en mousse). Ce que j’en retire, c’est que je dois encore m’affirmer un peu plus, oser prendre une décision risquée et l’assumer par la suite. Respirer un grand coup et foncer. Je sais que je peux m’appuyer sur une équipe en or. On a tous le même objectif : prendre notre pied et terminer la course sur nos pneus, le reste, c’est que du bonus.

En revanche, je trouve qu’on a vraiment été au top au niveau de l’organisation. Même sur les relais, malgré les derniers qui ont été un peu chaotiques, tout le monde a su réagir rapidement et permettre à l’équipe – oui, parce que ce n’est pas juste un pilote et la moto qui ont franchi la ligne d’arrivée, mais toute l’équipe – de passer le drapeau à damier.

Alors du coup, un grand merci aux pilotes pour m’avoir fait confiance sur cette course, Xavier et Seb qui ont décidé de s’en remettre à moi pour un rôle aussi prépondérant et Marie qui du coup redécouvrait la moto en plus d’avoir à faire à une novice de la gestion d’équipe. Merci aussi à Romain pour ses conseils, Claire et Céline pour le panneautage de compèt’ et bien sûr Brice et Pierrot les mécanos. Ce fut un week-end formidable. Merci aussi de m’avoir laissé ramener la moto du parc fermé au camion (même si Claire a dû m’aider à pousser sur la moitié du trajet puisqu’elle ne voulait pas démarrer).

Crédits photo : Le Gun Production